

Une vieille femme tourne autour de moi, en maugréant et répétant une incompréhensible litanie.
Elle est une des victimes des bombardements de la guerre du Vietnam. Aujourd'hui encore, comme tous les naufragés de tous les clans, de toutes les guerres, elle tente de survivre, en équilibre fragile, sur le radeau qu'a bien voulu lui laisser prendre les derniers jours de sa vie. Elle
a de petits brins d'herbe odorantes dans le trou de ses oreilles... sans doute pour oublier le bruit des bombes et ne sentir que le vent qui passe dans la fraîcheur du basilique à peine coupé. Elle se perd parfois dans un souvenir, le regard vague, absente et silencieuse. Elle rallume le sempiternel mégot qu'elle coince entre ses lèvres désséchées, et recommence son monologue. On dit qu'elle a un fiancé, un monsieur sourd, à cause du bruit des bombes, qui la regarde de loin, un peu désespéré et me fait signe presque en s'excusant, qu'il ne faut pas faire trop attention à elle. C'est pourtant son visage et sa douleur que je vais emporter. " Pour parler de la guerre, il n'y a que les larmes", le silence aussi et les vieilles dames qui étaient déjà mortes, quand elles étaient jeunes filles.

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