vendredi 1 janvier 2010

Mon voyage a déjà commencé...

Les voyages commencent longtemps avant le départ. Entre hier et aujourd’hui j’ai déjà pris un aller simple pour Vientiane au Laos, via Kaboul .
C’est à la hauteur de la Pyramide du Louvre, que le chauffeur m’apprend qu’il est Afghan.
- la situation est si compliquée, je ne sais pas si nous verrons la paix revenir dans les rues de Kaboul. Massoud le savait.
Retour sur image.
Massoud se bat depuis plus de vingt ans dans la vallée du Panjshir, dans le nord-est de l’Afganistan. Plus de dix ans de maquis en luttant contre l'Armée rouge, avant de prendre ses fonctions politiques dans le gouvernement mis en place lors du retrait soviétique.
Miné par les rivalités des chefs de guerre, l'Afghanistan tombe entre les mains des taliban en 1996. Massoud, qui défend Kaboul, préfère se retirer plutôt que de voir la capitale criblée de bombes. Depuis, il organise les troupes de l'Alliance du nord dans les montagnes et coordonne l'action politique du gouvernement déchu.
Chaque jour aussi, dans la solitude, après les journées de combat, le commandant Massoud écrit dans un journal, des dépenses à prévoir, les poèmes qu'il affectionne, des lettres aux grandes puissances : « J'ai passé ces vingt dernières années, la plupart de ma vie d'adolescent et d'adulte, aux côtés de mes compatriotes, au service de la nation afghane, à mener une dure bataille pour préserver notre liberté, notre indépendance, notre droit à l'autodétermination et à la dignité. »
Le 3 avril 2001, un mardi, le commandant Massoud arrive dans un avion privé, pour un marathon de deux jours entre Paris et Strasbourg. De cette visite éclair, je me souviens qu’on ne l’écoutait pas. Il est assassiné le 9 septembre.
Je passe donc les dernières heures de 2009 dans les rues de Kaboul, toujours en guerre, mon taxi conduit par un père de famille Afghan.

En approchant de l’aéroport, Kevin, le chauffeur de taxi, m’apprend qu’il vient du Laos. De 6 à 14 ans il a été bonze dans un monastère jusqu’à ce que sa famille le rapatrie sur la France.
- nous avions une heure de méditation chaque jour. Ces années de monastère m’aident encore aujourd’hui, sans cela, je ne verrai pas le monde de la même façon. J’ai appris à ne pas accumuler rancœur, haine, peine ou tristesse. Trop encombrant pour un voyage. Je ne garde que les choses dont le souvenir peut me faire sourire.
- c'est comme le vin alors, il garde un peu du soleil, et de la pluie, mais il n’est ni le soleil ni la pluie. Il est autre chose.
Le taxi s’enfonce dans la grisaille de Roissy, entre des buildings de verre qui ne reflètent rien du ciel. A l’arrière, j’ai déjà commencé mon voyage, conduite en douceur par un ancien moine bouddhiste. "Un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas."

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