samedi 7 novembre 2009

Promenade...

Les chênes étalent leurs ramures dans le soir qui tombe. Les chiens, pressés, truffes au vent, sont à l'affût de la moindre senteur. Le plus vieux va en tête, ses poils couleur de caramel se confondent avec le sentier. Les deux autres, noirs comme les réglisses de mon enfance, suivent, jeunes et fougueux, sans jamais le dépasser. Ils rebroussent parfois chemin en galopant et se jettent sur moi. Leurs museaux embaument le romarin. Près de la rivière presque à sec, j'ai retrouvé le buisson d'immortelles. Les fleurs comme de minuscules soleils séchés, laissent sur les doigts, une odeur forte de curry.

A l'heure d'hiver, il n'est que cinq heures, mais déjà la lumière inonde de mauve les troncs noueux et les chardons. Les collines sévillanes se préparent pour la nuit. Elles passent un châle sombre sur leurs épaules, et laissent à leurs pieds quelques touches d'ocre. Très haut, dans le ciel griffé d'un soleil orange qui s'attarde, un avion trace une ligne cotonneuse et droite. Nul voyageur ne peut voir de là haut, une femme, seule, qui marche, entre chiens et loups.
J'aime ses promenades dans un automne qui semble ici, si différent. Pas de tapis de feuilles mortes qui crissent sous les semelles de crêpe, ni de cèpes enfouis sous la mousse, pas de fougère non plus, dans les sous bois. Les chênes centenaires, jettent discrètement sur leurs racines un manteau de glands charnus et verts, que les cochons en liberté, engloutissent bruyamment à longueur de journée. On voit sur le chemin, les traces en demie lune de leurs pattes. Tout proche, deux taureaux se battent, entrechoquant leurs paires de cornes comme deux lutteurs s’empoignant sur un tatamis. Une poussière ocre dissimule un instant les combattants. Le plus lourd, le pelage couleur de châtaigne, n’a laissé aucun pouce de son territoire, il redresse son cou fort et musclé et dégage l’armure de ses cornes dressées vers le ciel. L’autre, noir comme le jais s’éloigne, vaincu, en balançant une tête penaude.

Le vent se lève, par bourrasque, presque froid mais en même temps suave. C’est une étrange et rare fraîcheur sur le visage, une caresse brusque et lascive à la fois, qui joue avec les mèches de cheveux et soulève, impudique, les pans de ma veste de laine. Les chiens fatiguent un peu et tirent la langue en attaquant la dernière côte. Juste après, la maison, halot de blancheur dans le soir violine. On a déjà allumé les deux lanternes. Les jasmins exhalent d’entêtantes senteurs d’été en ce début novembre. Je crois que je vais rentrer…

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