dimanche 28 mars 2010

Sieste

Laisser le monde tourner sans nous... Basculer pour un instant loin des zones de turbulences et se laisser aller à la douce torpeur de l'après-midi. Suspendre le temps sur la corde à linge de la vie, et laisser sécher ses larmes, parfois. La tête lourde des tourments de nos coeurs, s'accouder à l'équilibre fragile du monde pour souffler un peu. Les paupières cherchent la pénombre, balbutient devant l'hésitation du sommeil et s'abaissent, comme les rideaux sur la scène, à l'heure de l'entracte. Nous voilà entre deux mondes, dans le couloir fragile du relâchement. A cet instant de ravissement extrême, où l'on dort sans dormir, où l'on veille sans résister, ce "cul entre deux chaises" de la conscience (voir Viento page 103), là, c'est le bonheur! Qui résisterait à cette merveilleuse somnolence qui envoie les emmerdeurs se faire pendre ailleurs? Qui laisserait pour tout l'or du monde, ce microcosme d'infinie douceur? Sentez le corps lâcher prise, au moment où, le flot ininterrompu des idées en tout genre, commencent à se tarir. Nirvana éphémère où l'Homme devient Sage. La voix des autres se fait lointaine, ce n'est plus qu'un ronronnement. Quel ravissant éloignement, quel délicieux isolement! Une trêve, mieux, une gourmandise volée dans la vitrine du temps qui passe et qui vous fait saliver d'avance. Oh ma sieste gourgandine, qui aguiche le passant sans même soulever un jupon! Bercé par la douceur de l'assoupissement, se prendre au jeu de l'indolence, reculez de trois case, passer son tour! Succomber à une nonchalance captivante et éhontée, sans tourment et sans rose aux joues. Voici l'instant sublime, le charme exquis d'un petit bonheur volé et de soporifiques extases. Voici la sieste, simple comme un bonsoir, délice à quatre sous, jouissance à la sauvette, somnolence qu'aucun Prince Charmant ne pourrait interrompre. Maudit changement d'heure, qui me vole un peu de cet oubli en milieu de journée!

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