lundi 22 février 2010

Nuit de métal

Miguel Galanda traverse la vie les mains dans les poches, peut-être pour ne pas faire remarquer qu'il serre parfois les poings. Ses silhouettes malaxées sur un tamis métallique se laissent traverser, par les particules infinitésimales de la lumière de la galerie Atalante, où il expose à Madrid, jusqu'au 28 février. Les oeuvres de Galanda, récemment exposées à New York, tissent un chemin fait d'Homme.
Voici le Premier, l'Adam. A l'aube des temps, suspendu entre paradis perdu et terre d'adoption. C'est le Premier, celui qui est à venir, nous assistons à ses balbutiements, pas encore souffrant, juste posé entre deux choix! Puis vient le Primitif, l'"en dehors", la Différence, celui qui commence à savoir -pierre après pierre, feux après feux- les secrets du Monde. Galanda lui fait pointer du doigt son descendant qui le regarde, presque un sourire aux lèvres, le poids des millénaires calé sur ses épaules. L'Antique, semble courir à perdre haleine, sur le chemin de Samothrace! Le conquérant triomphe et se tourne vers les Dieux, à qui il offre ses victoires. Ecce omo, le fils de Dieu crucifié par les hommes, le Rédempteur, écorché de souffrance jusqu'au pardon, ploie sous la croix invisible. Au bout de ce chemin des hommes, les pieds plantés dans le présent lourd qui colle à ses semelles, qui est-il donc, celui qui guette ainsi, les mains enfoncées dans ses poches? Que lui est-il arrivé, pour qu'un peu de légèreté traverse sa souffrance? Il est l'Homme, le Je d'où vient le Nous, dans la simplicité du détachement, dans l'obscurité de ses ombres, dans le scintillement de la lumière qui le parcours.
Appréhender le travail de Galanda, c'est aussi regarder Paris, froissée avec tendresse sur le support, pour emporter le regard dans un jeu de piste entre Bastille et Pyramide du Louvres. C'est aussi déambuler dans un décor d'opéra, où les silhouettes de l'Archange, du Fou et de l'Arlequin, tournent sans fin sur elles-mêmes. Un mobile tragique qui ramène aux vers de François Villon :
"Jamais nul temps nous ne sommes assis,
Puis ca, puis là, comme le vent varie,
A son plaisir sans cesser nous charie..."
Le travail de Galanda parle de la souffrance, de la Nuit Metallique. Ce qu'il ne sait peut-être pas, c'est qu'en laissant la lumière jouer avec ses ombres, la beauté dénudée s'insinue sous la toile et nous laisse Heureux, un moment...

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