
La pluie est venue les surprendre au cœur de l’hiver, pourquoi n’a-t-elle pas attendu la douceur du printemps pour faire croître sous leurs sabots, un beau tapis d’herbe verte et grasse ? Les taureaux voudraient se gorger de soleil! A défaut de combat, il s'arme de patience.
Parfois un soleil timide irise les champs, une lumière jaune pâle souligne les fleurs jaunes du mimosa, dont les parfums entêtants arrivent jusqu'aux barrières. Mais le ciel tire vite le rideau et déploie des voiles de pluie froide. Les chiens ont trouvé un abri, ils se pelotonnent près de la porte-fenêtre où s'insinuent les bouffées d'air chaud de la grande cheminée. Les labradors aiment l'eau, mais pas ces lames froides qui dégringolent d'on ne sait où et vous glacent l'échine, le plus jeune ne court même plus derrière les poules. Le ciel est encore descendu d’un ton, les nuages plombent d’anthracite la moitié du paysage et rapprochent l’horizon. La campagne Sévillane ne se reconnaît plus dans tous ces tons de gris, qu’elle a si peu connus. Le petit pont de fer qui enjambe la rivière doit faire le grand écart, devant la folie d’une rivière qui croit qu’elle devient fleuve. Devant l'entêtement du ciel, les hommes ont fini par prendre la pluie au sérieux, ils se sont mis eux aussi à regarder le ciel. Ainsi, près de Séville, sur les collines de chênes liège on peut voir le peuple des hommes, et celui des taureaux, sous l'interminable jour gris... ils regardent pleurer le ciel!