jeudi 16 septembre 2010

Peter Lindbergh

A Peter avec toute ma respectueuse admiration
Peter Lindbergh est un homme délicieux. Le rencontrer c'est apprendre à Voir, car rien ne lui échappe: pas une ombre, pas un recoin du soleil caressant, de ce jour là qui est passé si vite.
Il habite tout et rend beau les espaces inexplorés, ceux où l'on est trop passé, et les insignifiants. Il décèle les traces que nos habitudes ont piétinées et sans artifice il réinvente les encoignures du monde qu'on ne visite plus. Doux, prévenant, il s'empare des lieux en s'excusant. Mais après lui, notre univers n'est plus tout à fait à sa place. Il s'est passé comme une oscillation, il a basculé, un peu. C'est une légère courbure des choses, qui ont fait le gros dos en ronronnant comme un chat persan.
Il a imaginé les photos et se laisse pourtant faire par une épaule, un talon, un hochement de tête, une mèche que l'on relève. Il aspire l'air ambiant, il s'en délecte comme d'un vin frais et gouleyant. Il met de la couleur dans tout ses noirs et blancs.
Peter Lindbergh est en alerte: "Creation is the birth of something, and something cannot come from nothing". Sûr, qui vivra saura vraiment, il ne peut y avoir rien, je l'ai vu, oui, de mes propres yeux. Mais il y a un truc, et vous êtes le seul à le connaître, vous l'avez enfermé dans votre boite à malices. "May be all this is a question of how deep we are willing to go..." Oui, vous avez raison, cela dépend sans doute jusqu'à quelle profondeur nous sommes prêts à aller.

vendredi 10 septembre 2010

Retrouvailles

A Hélène et Régine...
Hier j'ai retrouvé des amies de l'enfance, complices des tableaux noirs et des blouses de nylon. Enfouies dans la poussière de craie, un cartable oublié, un cahier de vacances.
Par dessus: l'anonymat des facs, les coups de pouce, les coups du sort et les acharnements, les jours de gloire aussi... Il y a eu les enfants, les amours, les amis, les qui passent et les pour tout le temps. Les portes ouvertes et celles qui claquent. Des petits devenus grands, des éternels absents, des qui ne reviendront plus mais qui sont là quand même, des partis loin, des éternels en mouvement, des qui n'ont pas bougé, des qui restent les mêmes, des qu'on ne reconnait plus. Mille livres ouverts, des tickets effacés, des pages de cahiers, des parapluies perdues et des sacs oubliés. La craquelure du caramel des crèmes brûlées, des sandwichs avalés à la hâte, la solitude des séminaires et les cris des gamins autour d'une mariée. Des cris du coeur, des silences, des fous rires, des murmures au coin de l'oreille. Il y a eu des plages de sable blanc, des rues glissantes, des cartons, des nettoyages en grand et des empilements. Et puis des jours, des nuits, des pluies et des soleils... la vie, la sienne, la mienne et puis aussi la sienne. Elles, toujours, là, postées en embuscade dans un coin de mémoire. Elles, un bout de mon histoire.

mardi 7 septembre 2010

Madrid

Je flâne, le nez en l'air, dans Madrid, où souffle un vent à décorner mes chers taureaux sévillans. Le glacier, a empilé ses chaises, et le soleil s'amuse dans la géométrie des architectes. Un concierge, musarde sous les porches. Celine a raison : "Une ville sans concierge ça n'a pas d'histoire, pas de goût, c'est insipide telle une soupe sans poivre ni sel, une ratatouille informe".

Je flâne, le nez en l'air dans Madrid, pour une fois je n'ai ni train, ni avion à prendre. De cette promenade sans but, je garde une lumière engloutie par le miroir gourmand des fenêtres, l'oblique d'un échafaudage qui aimerait perdre l'équilibre...
Mardi, une moto frôle le trottoir, bonne nouvelle, elle a évité l'autobus qui se moque du tiers comme du quart, du reflet chromé du pare-choc qui s'éloigne.
Confidence d'un piéton qui marmonne dans une barbe qu'il porte courte:
- cabron, vaya el tio!
Moi cabron, j'aime pas le traduire. On pourrait dire salaud, mais ç'est pas ça. Cabron, ça sent le cuir, la sueur, le crachat, l'empoignade dans les bars, et les saveurs acres des cigares.
Je flâne dans Madrid, qui aujourd'hui se passe d'éventail, et qui a juste à secouer les arbres pour s'aérer les artères. Il y a un peu de folie dans l'air, un zest acidulé de je ne sais quoi, peut-être de la légèreté... "Et vous dansez sans le savoir, vous dansez en marchant sur les trottoirs cirés...".

samedi 4 septembre 2010

Exquise esquive




Il y a de la coquetterie dans l'air, de la gourmandise aussi. Un je ne sais quoi d'une enfance qui s'attarde et qui traîne les pieds. Un jour à la vanille, une pomme d'amour, qui flotte dans un océan couleur pastille de menthe. Il y a ce fil qu'on ne voudrait pas rompre, et les corps qui ne savent pas mentir... Il y a l'été qui fait oublier que nous sommes en hiver...
On tourne le dos pour en savoir le moins possible sur le voyage, parfois accidenté. On fait comme d'habitude, tout du moins on essaye.
- Vois-tu, cette seule petite impulsion iconoclaste, me rend maître du temps...
- Oui, mais un instant seulement
- C'est peut-être ça qui me donne le goût d'éternité!

vendredi 3 septembre 2010

Rouge sang

Un soir d'orange, éclaboussé. La poussière du soir las, qui s'écroule, sur la campagne incendiée de soleil. A peine, un souvenir de pluie, il y a longtemps, quand le vent du printemps murmurait dans les feuilles. Le souffle brûlant venu du sud, gorgé des silences tonitruants du désert, consume la terre rubescente. Un papillon joue les retardataires et furette volubile, sur une poignée d'immortelles. Il n'y a rien à dire de plus de cet instant. Juste le figer, et ne rien perdre de cette éternité, le compas de ses heures ouvert, offerte, indécente et lascive. Déjà, la lumière s'habille de nuit en soulignant de pourpre sombre, la silhouette des collines. Qui meurt à cet instant du jour, et me bouscule dans une ultime ruade? Si l'on m'avait dit que l'été en avait autant dans le ventre, j'aurais entraîné et mon âme et mon coeur à cette marche forcée.
Au lieu de ça, je reste le souffle coupé, le regard dans les chardons en feu, qui dressent leurs épines vers la première étoile. J'en suis quitte pour des égratignures à l'âme qui me retardent pour rentrer. Je reste là, mes croquenots dans la caillasse, les yeux barbouillés de corail, suspendue au bord d'un monde qui disparaît..
Ensuite... le soleil est allé se coucher!

mercredi 1 septembre 2010

Septembre

Oups! J'ai voyagé...beaucoup- j'ai farnienté...pas mal,- j'ai lu...à m'en fatiguer les mirettes- j'ai parlé...peu, et mille autre choses que le travail vous dérobe et que les vacances vous restituent, comme le fait la maîtresse quand en début d'année, elle vous a confisqué un yoyo. Tout, sauf... ECRIRE ! Ah en voilà des vacances, pas un subjonctif, pas un tréma ni même un adjectif à mettre au pluriel ou au singulier. Aucune conjugaison du verbe avoir, que je n'ai même pas eu à accorder avec le moindre complément d'objet direct placé avant. Mes verbes de vacances se déclinaient à tous les temps! Point de ces inénarrables oxymorons pour lesquels je me creuse souvent les méninges, oubliées les anphores et les synecdoques, effacés tous les mots de la marelle de mes histoires, vive la page...blanche!
Hélas, chasse le littéraire il revient au dico... et septembre est le mois des feuilles! J'ai donc gommé l'été et remis le stylo à l'encre!
Je n'ai jamais eu de penchant pour les bonnes résolutions de la rentrée qu'on laisse volontiers suspendues à la patère, dans le couloir de notre volonté. Donc, pas de croix de bois, ni fer, et évitons de cracher par terre, j'écrirai comme toujours jusqu'à plus soif, on ne peut pas se refaire!
D'autant que je me suis attelée à un ouvrage digne d'un constructeur de pyramide : la traduction en langue française du livre de mon mari, un pavé de 500 pages, dont la seconde édition est déjà pratiquement épuisée. Me voilà donc pour des mois, quelques heures par jour, penchée sur ma table comme un vieux scribe. Que dis-je un scribe, un vieux moine oui, qui à la lumière vacillante de quelques lampes, dont j'userai sans doute l'ampoule jusqu'au filament, remplira de pattes de mouches son parchemin électronique. Là, dans la solitude glacée de mon scriptorium, j'enluminerai de notre belle langue française, les arabesques savantes et littéraires de mon andalou de mari. Je choisirai pour lui les plus belles assonances, et quelques hyperboles à réveiller les morts. Que voulez-vous "si partir c'est mourir un peu, écrire, c'est vivre d'avantage !"
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